Cet article présente la deuxième partie du livre Positionning, the battle for your mind d’ Al Ries et Jack Trout. Ce livre est un des ouvrages de référence sur le thème du marketing de l’attention. La première partie se trouve ici.
Dans « Positionning, the battle for your mind », les auteurs nous présentent deux cas de figures. Un américain qui va à Los Angeles dira qu’il va à L.A. Par contre, celui qui ira à New-York ne dira jamais qu’il va à N.Y. Il prononcera le nom de la ville plutôt que son diminutif. La raison tient à la phonétique, L.A. sonne bien alors que N.Y nettement moins.
Cette dimension phonétique est ignorée par la plupart des marques. Pourtant, elles devraient s’en préoccuper. En effet, certaines grandes entreprises ayant des noms trop long ont tendance à opter pour une compression qui réduit la marque à ses initiales.
Si RCA est opportun pour éviter de prononcer les 12 sylabes de Ra-di-o Cor-po-ra-tion of A-mer-i-ca, ce n’est pas le cas WU pour les sept sylabes de We-s-te-rn U-ni-on. San Francisco n’est jamais devenu SF pour cette raison.
Alors si l’on suit cette logique, Franklin Delano Roosvelt et John Fitzgerald Kennedy n’auraient jamais dû devenir FDR et JFK. Pour Al Ries et Jack Trout, ces deux abréviations n’ont pu s’imposer qu’après que les hommes en question soient devenus célèbres. De même, les entreprises General Electric ou Hewlett Packard n’ont pu se rebaptiser GE et HP qu’après être devenues célèbre.
De plus, l’étude menée par les auteurs du livre pour illustrer ce chapitre est sans appel. Elle révèlent que 49% des marques « initiales » sont connues par le panel contre 68% de celles qui ont un véritable nom.
Les noms complets sont efficaces pour construire une image du fait de cette dimension phonétique. Nous en faisons l’expérience en apprenant un poème. Il nous apparaîtra encore plus beau et mémorable si nous le récitons de vive voix plutôt qu’en le lisant dans nos têtes.
Les noms General Electric et Radio Corporation of America sentaient bon le début du XXème siècle. Une époque où les mots électrique ou radio étaient associés à un imaginaire poétique moderniste. Le tableau « La fée électricité » de Dufy en 1937 ou le « Réverbère » de Giacomo Bala (en tête de post) peuvent nous servir de repère ici.
Mais si l’intention et la créativité d’un grand artiste comme Bala traverse le temps, quelque soit son sujet, ce n’est pas le cas d’une marque. Celle-ci intervient dans un espace actuel et les mots se chargent de sens nouveaux.
Dans le cas de Radio Corporation of America, son nom complet renvoie à une technologie devenue usuelle. Le mot radio n’éveille plus les mêmes idées qu’il y un siècle. Ne reste donc qu’une phrase interminable en guise de nom. La réduction de cette marque déjà célèbre en RCA était donc acceptable.
Mais les grandes sociétés doivent éviter de recourir à des acronymes. TWA, la compagnie aérienne aurait pu choisir Transworld, bien plus prometteur que ces trois lettres dépourvues du moindre sens.
Les petites entreprises quant à elles doivent absolument éviter de recourir à des acronymes sous peine de compromettre leur avenir.
Alka-Seltzer qui avait connu le succès avec son antalgique décida de lancer dans les années 80 un analgésique appelé Alka-Setzer Plus. Il concurrençait le Dristan ou Contac. Pourtant, les ventes d’Alka-Setzer Plus ne firent qu’éroder la part de marché d’Alka-Seltzer sans embêter ses concurrents.
De la même façon qu’il existe deux stratégies de croissance, il existe deux stratégies de nommage. Un interne, l’entreprise reprend le nom de la marque ou du produit vedette comme pour Alka-Seltzer Plus. L’autre externe, l’entreprise choisit un nouveau nom pour chaque lancement de produit.
Chez GE (General Electric), il est impossible de lancer un produit sans que le nom GE lui soit adossé. La marque utilise ainsi une stratégie de nommage interne.
Or les marques devraient se méfier de cette stratégie car elle peut mener au désastre. Si Alka Seltzer Plus avait été le premier à se positionner sur le marché des analgésiques, cela aurait pu fonctionner. En effet, l’important est d’être le premier dans l’esprit du client.
Mais là, ce n’était pas le cas, il y avait déjà des concurrents solidement établis. Cette stratégie a fini par se retourner contre les positions d’Alka-Seltzer sur son marché principal, celui des antalgiques.
Nous avons vu également la stratégie multi-marque de Procter et Gamble. Celle-ci est très bénéfique à la marque. Il est donc étonnant de voir son concurrent principal, Colgate-Palmolive s’acharner à démultiplier ces deux marques.
Nous avons ainsi les dentifrices Colgate, les brosses à dent Colgate, les fils dentaires Colgate, les crèmes à raser Palmolive, les savons Palmolive, la lessive Palmolive, etc.
De plus, ces noms n’ont aucun sens. Pour rappel, voici les noms choisis parson concurrent Procter et Gamble pour ces mêmes catégories de produit : Dentifrice « Sourire » ou « Brillant’, etc. Il n’est donc pas étonnant que Procter et Gamble pèse le double du chiffre d’affaire de Palmolive.
Un nom doit donc concerner un seul produit. Dans le cas où une marque préexistante parviendrait à imposer son nom dans un nouveau segment (et dans l’esprit du client), elle risque de perdre son leadership sur le marché de départ.
C’est ce qui est arrivé à Heinz en a fait l’expérience avec son Ketchup. Auparavant la marque était connue pour ses boîtes de cornichons. Elle se diversifia dans les Ketchups où elle devint la marque de référence. Ce positionnement lui fit néanmoins perdre sa première place dans les boites de cornichons.
Les auteurs rappellent également que certaines marques comme GE ou XEROX, en se diversifiant dans l’informatique, ne devraient même plus utiliser leur marques mais tenter de développer des produits ayant des marques autonomes.
Les extensions de gamme sont des erreurs mais les marques y ont toujours recours. Pour rappel, une extension de gamme diffère d’une diversification. Il s’agit d’offrir le même produit avec des fonctionnalités différentes afin d’élargir la base de clients existants.
Les stratégie d’extension de gamme les plus connues sont les montées en gamme, en performance, en fonctionnalités (ajout d’un usage complémentaire à l’usage central), en qualité de service (service premium avec support inclu), les versions économiques (savons en poudre => savons liquides), des versions limitées avec un design plus travaillé …
Dial avait connu le succès avec un savon puis elle se lança dans les déodorants. Le groupe pensait que les acheteurs de savons Dial achèteraient le déodorant. Mais ce ne fût pas le cas.
Bayer lança un acétaminophène appelé “Analgésique Bayer sans aspirine”. Le nommage était intéressant car il était explicite et les clients des autres analgésiques comme le Tylenol auraient pu basculer vers Bayer. Mais comme pour Dial, la présence du mot Aspirine fût pénalisante car la marque Bayer était justement associée à l’aspirine.
Aspirine ou Dial sont sont des marques devenues des noms génériques. Tout comme Fiberglas, Formica, Jell-O, Kleenex, Band-Aid et Sanka.
Les noms génériques sont très efficaces, il est facile de promouvoir à la fois son produit et de l’associer à une catégorie entière. De plus, les concurrents travaillent pour vous lorsqu’ils font la promotion de leur produit.
Lorsque l’on se place du point de vue du client, l’extension de ligne apparaît donc comme une dégradation de cette position de référence. En développant un Bayer Sans Aspirine, Bayer abîme la position de l’aspirine dans l’esprit de ses clients.
Ce qui vient en premier en tête du client lorssqu’il achète un produit, c’est le nom du produit et non le produit lui-même. JC. Penney est un fabricant de batterie renommé, son nom est très élégant contrairement à celui de son concurrent, la Diehard.
Mais au moment de faire un choix, le client qui aura le choix entre l’élégant nom JC Penney et l’efficace DieHard (Irréductible) fera probablement le choix de l’efficacité.
Protein 21 est un shampoing pour homme que Mennen lança sur le marché. Il atteintrapidement 13% de part de marché. Mennen décida d’étendre la gamme. Elle lança un après-shampoing Protein 21, un deux en un Protein 21, un fixateur Protein 21, etc.
Elle lança également une autre gamme, Protein 29 avec les mêmes déclinaisons.
Les ventes du shampoing s’effondrèrent pour atteindre 3% du marché. Les produits furent retirés.
Life Savers est une entreprise dont les dirigeants croyaient sincèrement que leur chewing gum, le life saver (bouée de sauvetage) évoquait bien plus qu’une sucrerie avec un trou au milieu. Il signifiait aussi un goût excellent et un produit de qualité.
En fait, tout le monde reconnaissait le chewing gum life saver mais pas pour son excellence et sa qualité, mais bien pour sa forme. Mais le leader sur la marché du chewing gum s’appelle Bubble Yum et son nom est plus adapté au produit qu’une bouée de sauvetage.
Eveready d’Union Carbide dominait le marché des piles quand celles-ci étaient utilisées essentiellement pour les lampes torches. Avec l’arrivée du transistor à pile, il devint nécessaire de disposer de piles plus puissantes. P. R. Mallory lança alors la pile alkaline Duracell alkaline. Celle-ci avait des couleurs très particulières : or et noir.
Union Carbide lança alors son propre modèle de pile alkaline en reprenant les couleur or et noir de son concurrent et en écrivant le mot Eveready alkaline en gros. La pile Duracell, elle ne mentionnait que son propre nom Duracell. L’entreprise n’avait pas besoin de mentionner le nom Alkaline car dans l’esprit des gens, Duracell avait lancé ce produit en premier. Duracell voulait donc dire Alkaline, tout comme Bayer = Aspirine ou Coca = Soda.
Finalement, plutôt que de continuer à renforcer les ventes de Duracell, Union Carbide créa les Energizer avec un code couleur et un packaging vert et argent.
[A noter qu’une partie des exemples donnés par les auteurs comme celui de Bayer sont des diversifications traitées comme des extensions de gamme, ce qui explique l’échec.]
Les équipes de New-York de baseball, football, basketball et tennis s’appellaient à un moment respectivement Mets, Jets, Nets et Sets. Mais la mode s’arrêta là. Le club de tennis changea de nom de et se baptisa les New York Apples.
Les extensions sont populaires car elles peuvent apporter des avantages à très court terme. Le nom va fonctionner comme un flash et permettre une association avec quelque chose de déjà reconnu par ailleurs.
Les premières ventes d’Alka-Seltzer Plus furent d’ailleurs plutôt encourageantes. Mais cela est désavantageux à long terme car deux problèmes se posent :
Levi’s a par exemple tenté une aventure désastreuse dans la chaussure. Les clients n’ont pas aimé voir la marque Levi’s sur des chaussures.
Procter & Gamble a dépensé 50 million de $ pour lancer un nouveau détergent, le Liquid Tide basé sur la formule d’un savon en poudre vedette de la société, le Tide Powder. Le liquid tide devait concurrencer le leader du marché, Wisk. Malheureusement, le Liquid Tide ne parvint qu’à cannibaliser les ventes de Tide Powder.
C’est aussi ce qui est arrivé à Packard. Dans les années 30, la marque fabriquait des voitures du niveau de celles de Rolls Royce. En 1954, elle se décida à attaquer le segment du dessous et lança un modèle plus abordable, la Clipper.
Ce fût un succès commercial immense. Mais ce succès abîma la position de Packard dans le très haut de gamme. La marque disparût quelques années plus tard. Deux décennies plus tard, General Motors introduisit une Cadillac Cimarron avec le même principe de haut de gamme un peu plus abordable. Depuis, Cadillac est à la peine face aux marques de luxe allemandes.
Volkswagen a bâti sa réputation grâce à des voitures d’entrée de gamme comme la Coccinelle. Pourtant quelques décennies plus tard, la marque lança des modèles plus haut de gamme comme Jetta et la Passat. Il s’en suivit une dégringolade de la marque allemande sur le marché des voitures importées aux États-Unis.
L’extension de gamme est donc un piège si les produits sont lancés sans être positionnés. Al Ries et Jack Trout proposent les pistes suivantes pour savoir s’il est possible d’utiliser ou non le nom de l’entreprise.
1. Volumes. Les produits positionnés pour prendre une place de leader avec des ventes importantes, les produits ne doivent pas porter le nom de l’entreprise. Si les ventes prévues sont faibles, alors les produits peuvent porter le nom de la marque.
2. Concurrence. S’il n’y a pas de concurrents encore sur le marché, il ne faut pas reprendre la marque de l’entreprise. Si le secteur est déjà encombré, le nom de l’entreprise est un plus.
3. Publicité. Les grandes campagnes publicitaires ne doivent pas porter sur le nom de l’entreprise. Les petites campagnes oui.
4. Type de produit. Les produits trop disruptifs ne doivent pas porter le nom de l’entreprise. Les fonctions ou services additionnels, oui.
5. Distribution. Les produits sur étagère ne doivent pas porter le nom de la marque. Par contre, les produits vendus par des représentants.
A l’époque où le livre a été écrit, Xerox poursuivait sa politique de diversification dans l’informatique. Les auteurs annoncent que la marque ne peut pas changer ce qui est à l’esprit du client. Xerox est associé aux photocopieurs et la politique de diversification avec la marque Xerox est vouée à l’échec.
Pour se positionner, Xerox doit donc percevoir son environnement. Cet environnement, c’est le bureau, là où les gens travaillent. Celui-ci a trois piliers, le téléphone et le fax où AT&T est la marque leader, IBM pour l’informatique et le réseau local et Xerox pour les copieurs.
Les fonctions de copieur s’enrichissent (Scan, Xerographie, etc.). Xerox peut donc renforcer cette position. (Au vu des développements techniques des trente dernières années, cette analyse d’Al Ries et Jack Strout passe bien entendu à côté de la plaque).
Il s’agit là d’une véritable mission de conseil qu’ont effectué Al Ries et Jack Trout pour le compte de la Sabena, l’ancienne compagnie aérienne nationale belge.
La publicité d’alors disait « Doit-on être bon vivant pour prendre la Sabena ». Les repas de la Sabena avaient beau être excellents, ce n’est pas pour cette raison que les passagers en partance pour l’Europe accepteraient de faire un crochet par Bruxelles.
La Sabena devait donc positionner d’abord son pays, la Belgique. Les américains savent peu de choses de ce pays, contrairement à la France, l’Angleterre, les Pays-Bas, etc.
Les bureau de tourisme belges aux États-Unis faisaient d’ailleurs la promotion de leur pays en mettant en avant la centralité de Bruxelles par rapport à ces trois destinations. L’autre critère mis en avant par le bureau du tourisme était la « beauté » du pays. C’était un début mais ce n’était pas suffisant.
Les auteurs réalisèrent que six villes du pays étaient classées 3 étoiles par le guide Michelin : Bruges, Ghent, Anvers, Bruxelles et Tournai. Les Pays-Bas n’en avaient qu’une seule : Amsterdam.
La publicité proposée était donc la suivante : “Dans notre beau pays, il y a cinq Amsterdams.” Ce slogan était accompagné de cinq photographies représentant les villes citées plus haut.
Le slogan visait à récupérer le maximum d’informations déjà présentes à l’esprit du prospect :
La campagne fût à peine proposée que l’équipe dirigeante de Sabena aux États-Unis fût remplacée. Les nouveaux dirigeant annulèrent la campagne sur ordre du siège à Bruxelles.
Les auteurs cherchaient à installer une carte postale de la Jamaïque dans l’esprit du public américain pour promouvoir le tourisme dans ce pays. La difficulté est que les autres pays des Caraïbes avaient déjà installé la leur, en particulier les Bahamas et la Barbade.
Plutôt que d’aller en Jamaïque pour essayer de récolter un maximum d’images et essayer de voir lesquelles pouvaient « entrer dans l’esprit du client », les auteurs cherchèrent ce qui existait déjà dans l’esprit du client.
La Jamaïque est un île montagneuse et verte avec un arrière pays, des pâturages, des plaines, des rivières, des chutes d’eau et une forêt dense.
En décrivant ces caractéristiques, une image d’une autre île apparaît Hawaï.
La Jamaïque disposait donc des qualités de Hawaï en étant bien plus proche. Le positionnement choisi fût « Le Hawaï des Caraïbes ». Cela permettait de capitaliser sur des images déjà existantes à l’esprit du client tout en suggérant deux autres avantages : un prix de billet plus bas et un temps de voyage bien moins long.
Milk Duds est une marque de barres chocolatées qui souhaitait se faire une place dans ce marché. Elle était confrontée à deux difficultés :
Milk Duds devait donc d’abord repositionner ses concurrents.
Les barres chocolatées avaient diminué en taille ces dernières années et elles se mangeaient très vite. Cela provoquait un mécontentement assez fort des parents qui se méfiaient de ce type de friandise.
Les Milk Duds étaient différents. Ils venaient en boite de 15 plutôt qu’à l’unité. A l’inverse des autres barres chocolatées, on mettait plus de temps à les manger. Pourtant, la marque n’avait jamais songé à faire valoir cet avantage là dans ses publicités.
Les auteurs proposèrent une campagne publicitaire où des enfants mangeant des barres chocolatées étaient déçus qu’elles soient rapidement terminées. Puis ils découvraient des Milk Duds qu’ils se mettaient à apprécier, d’autant plus qu’ils duraient longtemps.
Al Ries et Jack Trout nous disent qu’avec cette campagne, Milk Dudd pût enfin trouver une position avantageuse sur le marché des barres chocolatées.
Mailgram était un service de Western Union lancé à la fin des années 70. Il fallait appeler un service, lui épeler le contenu du télégramme et celui-ci était envoyé à son destinataire.
Western Union avait communiqué autour du côté novateur de son service. Il était « électronique », entièrement « informatisé » et il faisait « entrer le télégramme dans l’ère du digital » (nous sommes dans les années 70).
Mais cela ne prenait pas, le télégramme ordinaire, autre service de WU, continuait d’être la référence malgré un prix plus élevé. Les gens n’étaient pas encore prêts à changer leurs habitudes.
Al Ries et Jack Trout proposèrent d’abandonner cette piste pour aller se positionner « dans l’esprit du prospect ». Mailgram pouvait capitaliser sur la position de leader de Western Union qui signifiait pour beaucoup de gens l’idée de transport d’un message avec une remise garantie au destinataire. La différence entre les deux services ne pouvait donc pas se jouer sur la qualité.
Ils proposèrent donc :
« Mailgram, l’impact du télégramme pour une fraction de son coût ».
Les dirigeant de Western Union réservèrent un accueil froid à cette proposition. Mailgram de se positionnait contre un autre service de Western union. De plus, ils ne voyaient pas l’intérêt de se positionner en rapport au télégramme qui était un service déclinant sur le long terme. On organisa un split test dans six villes Boston, Chicago, Houston, Los Angeles, Philadelphie et San Francisco.
On y compara cette proposition de campagne avec une deuxième proposition qui ne positionnait pas le service et mettait l’accent sur la vitesse avec une tonalité d’ensemble plus positive.
« Mailgram, un nouveau service rapide pour vos messages importants – Mailgram: A new highspeed service for important messages.”
Après treize semaines de test, il apparut que l’efficacité de la première où le produit était positionné par rapport au télégramme était bien meilleur. La seconde campagne avait eu des résultats honorables, mais ses performances étaient en moyenne 20% plus basses que la première.
Un test de notoriété acquise après la campagne permis de réaliser que les clients exposés à la première campagne avaient retenu le nom du service alors que c’était moins souvent le cas avec la campagne où le produit n’était pas positionné.
Lorsque dix ans plus tard, WU décida d’abandonner ses campagnes de positionnement et d’utiliser des messages plus ordinaires pour son service Mailgram, les ventes déclinèrent.
Long Island Trust était depuis des années la banque leader à Long Island. Mais les grandes banques de la ville de New-York menait des campagnes de plus en plus agressives depuis que la loi permettait maintenant à des banques de se déterritorialiser. Chase Manhattan, Morgan, etc. menaçait donc maintenant sa position de banque locale de confiance.
Une analyse de la perception de la banque fût réalisée sur les critères suivants : (1) Nombre de bureaux (2) Étendue des services, (3) Qualité du service, (4) Capital de la banque, (5) Contribution à la vie des habitants de Long Island et (6) Contribution à l’économie de Long Island.
Sur les quatre premier critères, Long Island Trust était bon dernier. Sur les critères 5 et 6 par contre, elle arrivait au contraire en premier. Ce n’est pas surprenant si l’on considère le nom de la banque.
Deux stratégies étaient possibles:
- Améliorer les quatre premiers critères en considérant de manière conventionnelle qu’il faut renforcer ses points faibles.
- Utiliser la théorie du positionnement et considérer qu’il faut s’appuyer sur ce qui est déjà à l’esprit du prospect pour bâtir sa position.
La campagne mettrait donc l’accent sur ces points suivants. Une première campagne posait ouvertement la question :
« Pourquoi envoyer son argent hors de Long Island alors qu’on y vit? »
Une seconde campagne reprenait le même message en s’appuyant sur la photo d’un immeuble de la Citibank avec des palmiers à ses pieds.
Quand 4 ans plus tard, on procéda de nouveau à une étude de perception d’image des banques à Long Island, la banque était passé de la dernière à la quatrième place sur les critères Étendue des services et Qualité du service. Elle était passée de la dernière place à la première place sur le critère Nombre de bureaux et Capital de la banque. Sur les deux derniers critères, elle s’était maintenue à la première place.
La campagne de positionnement fût immédiatement bénéfique pour la banque qui en retira des bénéfices de long terme, surtout sur des critères qui n’étaient pas vus comme ses points forts.
United Jersey est une banque beaucoup plus petite et bien moins célèbre que Long Island Trust, y compris dans l’état du New Jersey où elle était localisée. Elle comptait 116 bureaux et n’était que la cinquième banque de l’état derrière First Fidelity et Midlantic dans le nord de l’état et Mellon et First Pennsylvania dans le sud.
Il s’agissait donc d’une petite banque banque parmi des banques de taille moyenne.
Les deux colosses de la banque de détail à l’époque étaient Citibank et Chase Manhattan. Les auteurs proposèrent à leur client de ce positionner par rapport à ces deux colosses plutôt que vis-à-vis de leur concurrents habituels.
En se positionnant, la question que l’on doit se poser est ce que le client a à l’esprit. Il est donc nécessaire de se positionner vis-à-vis d’acteurs remarquables plutôt que d’acteurs secondaires.
La stratégie appliquée fût la suivante :
A. Exploiter le temps de réaction très lent des grandes banques de détail.
B. Encourager le management de la United Jersey à s’assurer que les engagements associés à leur positionnement soient respecté.
Ces engagements étaient les suivants :
1. Des décisions décentralisées : Les décisions seraient prises au sein des agences ce qui permettrait d’accélérer les réponses, notamment pour les demandes de prêt.
2. Le personnel de la banque est formé et sa compétence ne se limite pas à un seul type de produit.
3. Tout le système de la banque est informatisé et l’état de ses comptes peut être consulté en temps réel par téléphone (on est dans les années 70).
4. Traitement des chèques dans la journée.
5. Utilisation des terminaux FACT qui permettent d’effectuer des retraits avec contrôle de trésorerie en temps réel.
6. Réactivité. Être à l’écoute des besoins de financement de ses clients et répondre rapidement.
7. Centralité. En s’installant à Princeton, United Jersey se positionnait à moins d’une heure en voiture de la plupart de ses clients professionnels.
Les publicités à la télévisions mettaient en évidence le contraste entre la United Jersey bankers avec ses grandes banques appelées “Lethargic National Bank.”
Dans la première publicité diffusée, la “Lethargic National Bank » mettait une éternité à accorder un prêt. La seconde mettait en scène un conseiller de la “Lethargic National Bank » qui disparaissait à chaque fois que son client avait une question. Enfin, dans la troisième, un couple s’adressait à un conseiller qui leur répondait au ralenti.
Le slogan de chacune de ses publicité était le suivant : United Jersey accorde autant de valeur à votre temps qu’à votre argent“. En parallèle, des panneaux imprimée en 4*3 annonçaient une « banque en mouvement – fast-moving bank ».
Dans la mesure où ce programme de positionnement fût associé à une refonte de l’ensemble des processus de la banque, les résultats obtenus furent très positifs.
Stowe dans le Vermont est une station de ski déjà très connue aux Etats-Unis. Dans l’esprit des américains, son nom vient se nicher au milieu de celui de lieux comme Aspen, Val d’Isere et Kitzbühel. Sa reconnaissance provient de la forme la plus aboutie des publicités, le bouche à oreille.
Les dirigeants de la station souhaitaient continuer à alimenter ce bouche à oreille avec une communication efficace.
Harper’s Bazaar plaçait Stowe dans son top 10 des stations de ski, au milieu d’Aspen dans Colorado, de Courchevel, de Jackson Hole dans le Wyoming, de Kitzbühel en Autriche, de Portilloau Chili Chile, de St. Christoph en Autriche, de St. Maurice, en Suisse, de Sun Valley dans l’Idaho et de Vail dans le Colorado.
Pour Stowe, l’enjeu était de se démarquer dans cette liste. Les auteurs proposèrent :
« Parmi les 10 plus belles stations de ski au monde, une seule d’entre-elles se situe à l’est des Etats-Unis. – Of the world’s top 10 ski resorts, only one is in the East.”
L’avantage d’un tel positionnement est qu’il s’appuyait sur l’autorité que conférait le classement d’Harper’s Bazaar. Il ne restait plus qu’à positionner la préoccupation principale du public visé, celui des habitants de l’Est américain : le gain de temps et la simplicité d’accès.
Le recours à une autorité extérieure peut néanmoins avoir un désavantage. Elles est perçue comme encourageant les comportements moutonniers et elle est rejetée en conséquence par une partie du public plus soucieux de démarcation.
Là, les auteurs ont proposé à l’église catholique de résoudre le problème du déclin du nombre de ses pratiquants. Pour les auteurs, le problème venait du rôle de l’institution de plus en plus mal perçu depuis Vatican 2.
Al Ries et Jack Trout ont donc proposé aux dirigeants de l’institution de communiquer différemment en se recentrant sur la figure du christ.
Pour cela, ils proposaient de repartir du Sermon de Matthieu (Matt. 17:23) dans lequel Dieu a ordonné aux hommes d’écouter les paroles du Christ pendant son ministère sur terre. Puis le Christ en quittant le monde ordonna à ses suiveurs d’aller instruire les nations avec ce qu’ils avaient appris de lui (Matt. 28)
Il s’agissait donc de mettre en avant la mission « d’instructeur du monde » du Christ et non plus « d’instructeur de la loi ». Seule l’Église pouvait assurer ce rôle.
Or l’Église préféra (selon les auteurs) conserver la complexité de son message dogmatique plutôt que l’accroche simple proposée par les marqueteurs. La proposition fût donc rejetée.
Il est difficile de se positionner soi-même. Il est fréquent qu’un avocat ou un consultant avance qu’il est le meilleur de la place, le meilleur dans sa spécialité, etc. C’est très insuffisant, surtout quand sept de vos confrères sont passés avant vous. La première chose est donc de se démarquer et de définir quel concept nous allons utiliser pour établir une position de long terme. Ce n’est pas facile, mais la récompense peut-être importante.
Pour Al Ries et Jack Strout, tout parcours pour se démarquer soit se faire en se salissant les mains (lousy) et en prenant des risques. Ils prennent l’exemple d’un grand Jockey qui connût sa première victoire après 250 défaites.
Al Ries et Jack Trout rappellent que Marion Morrison est devenu John Wayne est que Issur Danielovitch se rebaptisa Kirk Douglas. Ils suggèrent donc de ne pas hésiter à changer de nom.
Il s’agit ici d’éviter l’emploi d’initiales comme J. S. Smith ou R. H. Jones.
Éviter de prendre le nom de son père ou de sa mère si elles / ils sont déjà célèbres. Liza Minnelli a fait ce choix et elle est devenue encore plus reconnue que sa mère Judy Garland. Avec Liza Garland, elle auré démarré avec un handicape. Frank Sinatra, Jr. n’a jamais pu percer par exemple.
Il faut se poser six questions pour positionner son job.
Le positionnement est un questionnement à l’envers. Il ne s’agit donc pas de se positionner soi-même mais de savoir comment ma position est perçue par mes prospects. Pendant longtemps, 7up pensait que son problème venait du fait que ses prospects préféraient les sodas noirs aux sodas blancs. Puis elle développa sa campagne « 7up, the uncola ». C’est à ce moment là que que 7up pût trouver sa position dans l’esprit des prospects.
Il fauit éviter les positions trop larges, éviter les offres générales et non ciblées.
Il est impossible de se positionner sans avoir à affronter les leaders de son segment. C’est eux qu’il faut connaître et la communication devra les cibler de façon implicite ou explicite.
En fonction des adversaires que vous avez à affronter, il est parfois difficile de tenir la route financièrement. Un groupe comme Procter & Gamble finance ses campagnes à hauteur de 50 millions de $. Il contribue au bruit ambiant et rend invisible la communication de ses concurrents. Il faut donc dans ces cas réduire son scope et cibler des segments moins chargés en message (cf. l’exemple des banques vu plus haut).
Votre société ne doit pas changer sa stratégie de positionnement initiale. Elle risque de perdre sa position de leader. C’est le piège dans lequel est tombé Bayer en communiquant sur ses produits « Sans Aspirine » avec le nom Bayer.
Il faut résister à la tentation de la créativité. De nouvelles idées peuvent perturber un positionnement durement travaillé. La créativité doit-être soumise à une stratégie de positionnement et non l’inverse.
En se positionnant de la sorte, une jeune entreprise pourra devenir un outsider. En tant qu’outsider, son ignorance sera un atout, elle apportera sur le marché une vision et neuve.
Grace au structuralisme et aux travaux de Roman Jacobson dans les années 1920 (et non pas grâce à la sémantique générale d’Alfred Korzybski des années 30 comme le prétendent les auteurs), nous savons que les mots n’ont pas de sens prédéterminé. Ils sont une forme et nous leur attribuons un sens par association avec les choses qu’ils désignent.
Les mots doivent être vus comme des déclencheurs. Ils nous servent à bâtir notre monde, nos structures mentales. Nous réajustons en permanence ce rapport au monde pour que le monde se conforme à nos structures mentales. Soit nous empêchons ce mécanisme d’adaptation et nous prenons le risque du conflit ou alors nous tentons de réajuster nos perceptions. Il est ainsi possible de décaler le sens d’un mot par maillage sans trop s’éloigner de son sens précédent.
C’est comme cela que nous adaptons aux innovations ainsi qu’aux grands boulversements sociaux auquels nous pouvons-être confrontés. C’est aussi la logique du positionnement. Il s’agit d’adapter, de décaler légèrement un rapport au marché établi par les ans au bénéfice d’un nouvel entrant ou d’un acteur moins bien positionné.
La question du positionnement est un sujet sur lequel beaucoup de débutants font l’impasse. Nous espérons pouvoir nous adresser au plus grand nombre alors qu’un positionnement plus restreint et qui nous situe de façon différenciante par rapport aux concurrents est probablement plus bénéfique.
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